“La robotisation des soins est toute proche"
Serge Lefevere (DETOO) veut répondre aux défis du secteur des soins
Serge Lefevere, l'un des partenaires du bureau d'architectes Detoo, fait partie de ceux qui ont fondé PRoF il y a dix ans. Une décennie plus tard, nous le rencontrons pour revenir sur le passé et voir ce que réserve l'avenir. “La robotisation des soins est toute proche," déclare l'architecte, “et cela va évidemment se traduire sur le plan architectural."
“Je connais Jan Van Hecke depuis très longtemps, bien avant le lancement du consortium PRoF en 2009. Il voulait échanger des idées sur la manière d'augmenter sa part en tant que producteur de mobilier fixe dans les projets de soins.”
“On constate dans le secteur des soins une evolution vers le secteur prive. Les hopitaux ne vont plus s'occuper que de leur activite principale et externaliser le reste”
En effet, Van Hecke est à la tête de Boone à Poperinge, qui est spécialisé dans les solutions gain de place. “Notre réflexion a débouché sur l'idée d'introduire des lits rabattables dans les environnements de soin. C'était totalement inédit. Nous avons intégré le lit dans la chambre du patient, ce qui représentait une valeur ajoutée car cela permettait par exemple à une mère de rester dormir près de son enfant, sans bouger les fauteuils. Ensuite, nous avons développé un concept de meuble mural intégré avec l'éclairage, la poignée, les gaz médicaux, le réfrigérateur … bref, tout ce qui se trouve derrière le lit du patient. C'est ainsi que nous avons évolué vers un nouveau concept de chambre intégré. A l'époque c'était impensable car la formule du marché public imposait des divisions en différents lots. Il n'y avait donc guère de cohérence dans la mise en forme. Parallèlement, nous caressions l'idée de créer une cellule de réflexion avec des partenaires issus du monde de l'entreprise, de la conception de produit, des professionnels des soins de santé, du monde académique …"
Depuis, la construction dans le secteur des soins a évolué, notamment grâce au financement …
Serge Lefevere: “Il y a un nouveau modèle de financement pour l'infrastructure hospitalière qui se compose de deux flux de subsides: le forfait de préservation et le forfait stratégique. Ainsi, l'hôpital a plus de responsabilités et est libre d'affecter ce forfait à des travaux d'infrastructure et à des investissements mobiliers tant que les adaptations ne touchent pas au planning stratégique.“
“VIPA n'a plus approuvé de nouvelles promesses de subsides d'infrastructure hospitalière pendant trois années successives, actuellement le budget total est utilisé pour respecter les engagements pris avant la sixième réforme de l'État. Nous remarquons donc déjà un report des investissements nécessaires avec, bien sûr, une grosse conséquence pour le monde de la construction. Dans le secteur des soins, nous constatons une évolution vers le secteur privé, les hôpitaux ne s'occupant plus que de leur activité principale et externalisant de plus en plus le reste."
Quel hôpital est actuellement future proof?
Serge Lefevere: “Lors de la conception, nous tenons compte des adaptations qui devront être effectuées dans les années qui suivront la construction car la médecine évolue très vite et l'organisation en soi change constamment. Personne ne sait ce qu'elles deviendront précisément mais nous constatons plusieurs choses. Il y a de plus en plus d'interventions peu invasives, de chirurgie robotisée, de big data et d'algorithmes. Et puis, il y a encore le développement de l'intelligence artificielle. Je pense au super ordinateur Watson d'IBM qui, dans certains cas, pose déjà de meilleurs diagnostics que les médecins. C'est vers ça que l'on va."
Un hôpital devient une maison de santé …
Serge Lefevere: “Le concept d'hôpital recule, la médecine préventive gagne du terrain. Le nombre de lits va également diminuer. Le passage aux hôtels de soins est une question de financement et il n'est pas impensable dans le cadre d'une responsabilisation poussée des hôpitaux concernant leurs moyens financier. Nous chercherons alors sûrement des solutions plus rentables."
La participation des médecins est aussi un phénomène montant?
Serge Lefevere: “Les médecins sont de plus en plus présents dans les directions et les conseils d'administration et ils investissent également dans les polycliniques, les cliniques privées et la robotisation. Un tout nouveau centre d'expertise pour la chirurgie robotisée ouvrira bientôt ses portes à Melle. Dans cette aventure, les compétences empathiques du médecin seront indispensables pour informer et encadrer le patient. Du fait de la robotisation, je vois de gros changements dans le futur concept des blocs chirurgicaux. Je pense à un centre comme la tour de contrôle à un aéroport, qui sert et supervise plusieurs salles d'opération. Bien sûr, cela doit être transposé sur le plan architectural en concertation avec nos clients."
La faisabilité financière des hôpitaux sera-t-elle un thème lors du rassemblement PRoF en 2019?
Serge Lefevere: “Après avoir travaillé par projet pendant dix ans, nous sommes finalement arrivés à une autre approche. Il ne s'agit plus de construire des chambres mais de relever les défis dans le secteur des soins. Dans cette perspective, on réfléchit à un ensemble de soins allant de la naissance jusqu'à la mort. En outre, il y a encore le mélange de différentes formes de soins et PRoF est bien placé pour y répondre. Nous allons certainement faire des propositions réelles."
