"Nous sommes sortis des crises sans trop de dommages"
Jos Heylen se considère chanceux d'avoir investi à temps
La revue Menuiserie est allé rendre visite à Jos Heylen, un spécialiste de l'aménagement intérieur de Hulshout. Le but était de parler de sa victoire dans la catégorie Eléments d'intérieur lors des Trophées Menuiserie 2022. Mais Jos avait bien d'autres choses à dire, notamment sur les crises successives que traverse le secteur de la menuiserie. Néanmoins, il est parvenu à les compenser en grande partie grâce à l'investissement qu'il avait réalisé juste avant dans un nouvel atelier.
Jos Heylen en quelques mots
Jos Heylen S.A. est une entreprise basée à Hulshout, spécialisée dans la construction intérieure. 2023 est une année un peu spéciale pour cette entreprise, qui fête son 75e anniversaire. "Mon père et mon grand-père ont créé l'entreprise en 1948", explique Jos Heylen. "Au départ, c'est surtout la menuiserie générale, associée à un magasin de meubles, qui a été l'axe principal entre 1973 et 1983. En 1983, j'ai fait souffler un vent nouveau dans cette menuiserie."
"Au début, nous faisions encore tout, mais il est vite apparu que nous devions faire des choix en vue de certains investissements. Comme j'étais ébéniste de formation et que j'ai étudié l'architecture d'intérieur en cours du soir, le choix de l'architecture d'intérieur s'est fait assez rapidement."
Employeur à 22 ans
"J'ai repris l'entreprise de mon père quand j'avais 19 ans. A peine trois ans plus tard, j'étais déjà un employeur. Tout s'est donc passé très vite. Vers 1990, nous travaillions avec environ six personnes. En fait, j'ai constamment investi: dans le personnel - pour un total de 31 employés aujourd'hui -, dans un atelier rénové en 2004 et dans un nouveau showroom en 2010. L'investissement le plus récent date de 2019 et comprend un atelier totalement neuf. Cette opération s'est accompagnée d'un grand nombre de machines supplémentaires et a marqué une étape importante pour notre entreprise."
"Nous faisons de l'artisanat authentique, associé à des machines de pointe"
clientèle haut de gamme
La clientèle de Jos Heylen se compose principalement de particuliers. "J'estime que les particuliers représentent environ 80% de notre clientèle. Le reste est constitué d'établissements de restauration et de bureaux. Nous visons principalement la classe moyenne et supérieure, ce qui signifie que nous réalisons beaucoup de projets haut de gamme. En ce qui concerne l'arrière-pays, nous opérons principalement dans un rayon de 50 kilomètres autour de Hulshout."
Artisanat AUTHENTIQUE, machines modernes
Jos Heylen: "Vous pouvez venir chez nous pour de l'artisanat authentique, combiné aux machines de pointe de notre atelier. Nous voulons être à l'avant-garde dans notre propre domaine. Nous visons davantage les projets ambitieux, moins le travail en série."
"Je me souviens qu'un maître de stage de l'un de nos stagiaires avait été fortement impressionné par notre degré d'automatisation et le travail sur mesure que nous pouvons offrir ici. En effet, nous élaborons tous nos projets dans TopSolid. Ces dessins sont traduits vers les machines CNC, qui préparent tout pour l'assemblage. Cela ne signifie nullement que notre personnel d'atelier se contente de poser des panneaux sur des machines. En effet, le travail sur mesure que nous proposons à nos clients exige une certaine perspicacité et une grande expertise."
"Rien à pêcher"
Jos Heylen emploie actuellement 31 personnes. Trouver du personnel supplémentaire s'avère être une tâche ardue. "Dire qu'il s'agit d'un très gros défi est un euphémisme", déclare le chef d'entreprise. "En fait, il n'y a absolument rien à 'pêcher'. Même les agences d'intérim recherchent activement des personnes à l'étranger."
"Pour les hommes de métier qui, pour une raison ou une autre, se retrouvent sans travail du jour au lendemain, ce ne sont pas les employeurs potentiels qui manquent. Mais l'époque où les employeurs pouvaient choisir eux-mêmes parmi une sélection de candidats est révolue. Il s'agit donc de chouchouter vos employés, et il existe de nombreuses façons de le faire. Nous avons peu ou pas de rotation de personnel et ceux qui partent d'ici deviennent souvent eux-mêmes indépendants."
Nouvel atelier
En 2019, Jos Heylen a emménagé dans son nouvel atelier. Il comprend, entre autres, un magasin automatique à l'étage. "Nous avons une colleuse de chants, bien sûr, mais aussi une machine verticale à commande numérique. Notre machine CNC actuelle a 14 ans et sera remplacée par une nouvelle machine à 5 axes en mars. C'était déjà prévu lorsque nous avons emménagé ici il y a quatre ans, et ce plan est en train d'être mis en œuvre."
"Avec le recul, je trouve que nous avons bien traversé la période du corona. Mais je dois avouer que j'ai été inquiet"
Continuer à produire en période de corona
Comme beaucoup d'industries, le secteur de la menuiserie a été confronté à une série de crises successives, à commencer par la période corona. Dans l'ensemble, Jos Heylen s'en est sorti sans trop de dommages.
"Le corona a pris tout le monde par surprise. Je me souviens que le premier confinement a été annoncé un jeudi soir. Le vendredi matin, j'ai immédiatement demandé le chômage technique à mon secrétariat social. Au début, les gens étaient un peu sceptiques à ce sujet, mais l'impact est vite devenu clair. Par exemple, nos placements ont été complètement interrompus parce que nous n'étions plus autorisés à entrer dans les maisons privées. Cependant, le département de dessin et la production ont continué à travailler. Ainsi, nous avons pu prendre de l'avance."
"Une fois le confinement terminé, nous avons accéléré tout ce qui était placement chez les clients. Nous avons pu y arriver en envoyant au montage quelques personnes de l'atelier. Donc, rétrospectivement, nous avons plutôt bien traversé cette période. Mais j'avoue que j'ai été inquiet. En effet, nous nous situons à la fin de la chaîne de construction et nous ne sommes évidemment payés que lorsque le chantier est livré. Donc, pas de placement signifie aussi pas de facturation, alors que mes dessinateurs et mon personnel de production ont continué à travailler. Heureusement, nous avions accumulé des économies au cours des dernières années et nous avons pu combler cette période."

magasin supplémentaire
La crise du corona n'était pas encore complètement terminée que la crise des matériaux est arrivée. Obtenir suffisamment de matériaux à un prix acceptable n'a pas été une mince affaire.
"Je me souviens qu'une fois, il fallait livrer sept paquets de panneaux et qu'à peine un seul se trouvait dans le camion. Deux d'entre nous ont donc passé une semaine entière à chercher des alternatives. Un coup de chance dans notre malheur a été que nous avons emménagé ici en 2019, nous avons donc pu utiliser l'ancien emplacement comme espace de stockage. Nous avons commandé tous les panneaux qu'il était possible de commander. Nous ne voulions pas nous retrouver à court."
"Mais lorsque les prix ont commencé à augmenter de manière exubérante, nous avons voulu devancer cette tendance en constituant des stocks. Et ça a plutôt bien marché. Car il n'y a rien de plus gênant que de devoir arriver chez le client avec un surcoût dû à l'augmentation des matières premières."
les livraisons étaient en retard
"Maintenant, la situation s'est nettement améliorée, mais nous restons prudents. Nous continuons à utiliser notre entrepôt supplémentaire car la situation est encore loin d'être stable. Si les prix du bois massif ont baissé, ceux des panneaux restent très volatils. Mais notre activité ne se limite pas aux produits du bois. Les appareils de cuisine ont également posé un gros problème. Normalement, ils sont livrés trois semaines avant le montage. La livraison n'avait jamais été un problème. Et puis soudain, on s'est retrouvé sans appareils Miele pendant plus d'un an. Pendant cette période, nous avons visité l'usine en Allemagne et le PDG lui-même, Markus Miele, est venu nous expliquer la situation. Il était clairement embêté, lui aussi. Nous avons essayé de surmonter ce problème en commandant nos appareils dès que l'offre était approuvée par le client. Et là encore, il a fallu se constituer un stock."
"Contre l'augmentation des coûts de l'énergie, on est pratiquement impuissant"
Crise énergétique
Et pour compléter le tableau, la crise des matériaux a été complétée par une crise énergétique. "Ces prix élevés de l'énergie nous ont coûté une bonne partie de notre marge l'année dernière", déclare Jos Heylen sans ambages. "Nous avons essayé de faire face à toutes les autres crises du mieux que nous pouvions, mais face à l'augmentation des coûts énergétiques, on est pratiquement impuissant. Nous essayons d'éviter autant que possible de répercuter ça sur la facture du client sans l'annoncer. La solution consiste à optimiser et à accroître l'efficacité. Heureusement, en 2019, nous avons emménagé dans un atelier bien isolé, avec un toit rempli de panneaux solaires et un chauffage par le sol. Cela a aidé à faire passer la pilule, mais pas complètement. Toutefois, sans l'investissement dans notre nouvel atelier, la situation aurait été bien pire."

Début 2019, Jos Heylen S.A. a emménagé dans un atelier bien isolé
chariot à café unique
La raison première de cet entretien avec Jos Heylen est sa victoire aux Trophées Menuiserie dans la catégorie des éléments d'intérieur. "Il s'agit de la réalisation d'un chariot à café et à dessert pour le restaurant Innesto à Zonhoven. En combinant ses connaissances et son expérience, l'équipe de Jos Heylen a réussi à convertir le design exceptionnel de Mieke Van Herck Architects en un meuble fonctionnel qui reflète les valeurs d'Innesto."
"Tout d'abord, un grand nombre de matériaux de haute qualité sont réunis. En même temps, il s'agissait d'un défi technique pour nous, car ce chariot est équipé d'éléments qui s'ouvrent de tous les côtés. Les dimensions du chariot sont assez limitées, surtout en profondeur. La stabilité était donc une préoccupation particulière car l'empattement était restreint. En travaillant avec des contrepoids, nous avons réussi à garder le chariot très stable tout en offrant une utilisation assez flexible. Le client souhaitait un objet qui suscite la curiosité spontanée de ses clients. Et je pense que nous avons très bien relevé le défi. En effet, chaque fois que le client accueille des clients curieux sur le plan technique, ceux-ci ont envie d'examiner le chariot de plus près."